Brèves critiques #1

01.01.21 – Maison
L’année 2020 débuta aussi par un film de gangsters The Irishman qui était bien plus ample que ce produit lissé. On pourrait presque dire que l’année 2020 commençait bien…

Les Incorruptibles, cette ligue des Gentlemen extraordinaires, est un conglomérat de trois hommes dont Sean Connery qui joue le rôle d’un balai-brosse spécial curling glissant sur des kilomètres de traînées de sang, qui opère sous la houlette de Kevin Costner. Ces hommes intègres doivent lutter contre vents et marées pour faire inculper Al Capone joué par De Niro qui cabotine de long en large et en travers. D’une musique outrancière et de situations pittoresques en situations pitoyables, de dialogues boursouflés en dialogues essoufflés, le film avance sans jamais approfondir aucun de ses sujets. Go to Serpico pour aborder la morale d’un héros et l’immoralité d’institutions gangrenées par l’argent. Expédition à Il était une fois la Révolution pour traiter de la prohibition. On ne dira pas que les personnages sont antipathiques mais…finalement si.

+1 pour la scène de lutte de Sean Connery sous la pluie et la lumière rouge brique ainsi que pour la référence à Eisenstein et sa fameuse scène de la poussette. Loin de moi l’idée que De Palma ne sait pas filmer, bien au contraire, il ne cesse de le faire en regardant son petit nombril.

02.01.21 – MUBI

J’ai entamé la filmographie de Guzman par le tome 3 (La Cordillère des songes) qui faisait le lien entre la Cordillère des Andes, territoire fertile mais oublié des populations chiliennes qui ne s’y aventurent pas plus que dans leur récent passé, celui de la dictature de Pinochet.

Sautant le tome 2 (Le Bouton de Nacre), j’ai repris le cours du récit à son commencement avec Nostalgie de la lumière. Dans chacun de ses films, Guzman mêle nature et dictature. Ici, les astronomes qui reçoivent la lumière du passé et les femmes qui tentent, tant bien que mal, de retrouver leurs défunts dans le désert. La quête du passé. Très peu s’y plongent. On enterre et on oublie. C’est la politique au Chili. Aveugler et continuer. Sans être transcendant, ce Nostalgie de la lumière est plus aride que l’explosion visuelle de la Cordillère des Andes (que j’ai traversé en bus). Un réalisateur qui me touche par son obstination.

03.01.21 – DVD

Avant de faire le singe en tenue de chasseur dans Adieu les cons de son ami Dupontel en 2020, Mister Gilliam a connu plusieurs vies de réalisateurs. D’abord Python, ensuite Jabberwocky, puis Monkey. Gilliam fait de la réincarnation un ésotérisme cinématographique. Le cinéaste sait se réinventer, à travers les époques, les genres et les territoires géographiques qu’il explore. L’armée des 12 singes est presque une boucle sans fin, comme la réincarnation, qui applique la phrase énoncée par Camus dans son discours de remise du Prix Nobel de littérature : Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais ma tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse.

Inspiré du court-métrage « La Jetée » qui est le nec plus ultra de la concision et de la poésie cinématographique, L’armée des 12 singes étend un univers Gilliamien : caméra penchée, décors délirés et palpables, personnages vrillés, acteurs maraboutés, histoire désenchantée qui fait du spectateur un des acteurs de ce long-métrage plus sombre et plus sérieux que ceux dont nous avait habitué le monsieur. Du cinéma qui nous abasourdi et ne cesse de nous interroger sur : « comment il a fait pour ce plan ? et pour ce décor ? » Foisonnant !

04.01.21 – France 3 replay

J’éprouve autant de sympathie à l’égard de Bouli Lanners qu’un arbre à la forêt qui l’entoure. Parce que c’est ça Bouli, c’est discret, c’est confortable comme une mousse qui pullule côté nord, c’est connecté avec son environnement et c’est beaucoup de sève qui hydrate ses nombreuses branches généreuses sur lesquels peuvent se reposer pléthore d’oiseaux. Dans les Géants, les oiseaux sont au nombre de 3, des gamins loufoques dont le destin rappelle fortement celui de la bande de Stand By Me. Comparé à leur pendant américain, les gamins respirent davantage, ils roucoulent plus brillamment, piaillent par moment. La caméra veut leur faire des câlins comme nous à Bouli. Finie la sylvothérapie, vive la Boulothérapie.

Ahhh, j’oubliais. En ce moment, j’ai toujours de vilaines urticaires quand il s’agit de films sur les adolescents… C’est pas mal mais c’est pas ma came. Mais indéniablement il fait partie des meilleurs du genre notamment pour sa capacité à ancrer son histoire sur un territoire qu’il émerveille et rend foisonnant.

04.01.21 – Blu-ray

Je lis à droite et à gauche, la pseudo vacuité des sœurs Wachowski qui savent filmer (c’est indéniable!) qui savent créer des univers entiers (c’est indéniable!), des scènes d’action de haute volée (c’est indéniable!) mais le propos ne serait pas suffisamment profond. Que nenni !
Voilà un cinéma viscéralement érotique (Bound, Sense8) où les individus, sans trop savoir l’expliquer, sont interconnectés. Bonjour l’absurde camusien, tchao Sartre car l’enfer c’est pas les autres (hormis quelques serials killers). Voilà un cinéma qui se suffit en lui-même, plein d’amour à la Bouli Lanners, nourrit indéniablement par la gémellité des réalisatrices. Les connections temporelles et filiales sont servies par un montage extraordinaire qui fait défiler ces presque 3 heures à vive allure.
Ça c’est une grosse machine, intelligente et sensuelle qui permet à chacun de vivre une expérience de grand spectacle qui se ressent et m’émoustille ne serait-ce que pour voir vu Halle Berry se démultiplier dans 6 rôles différents. Hugo Weaving et Jim Broadbent sont aussi incroyables.

05.01.21 : DVD

J’aurais apprécié m’enorgueillir d’avoir découvert cette pépite par moi-même sans que Le Monde et autres cinéphiles n’en fassent l’éloge quoique, sans InThePanda qui invitait ses auditeurs à passer la première demi-heure du film, je crois que j’aurais coupé ce film avant même la fin de son prologue.

Comme il convient de Ne pas coupez pour obéir à la règle du plan séquence de ce court-métrage dans le film, il convient au spectateur de Ne pas couper son visionnage pour aborder le making-off et la fabrication de ce film d’horreur surprenant et dérangeant à souhait dans la deuxième partie. Derrière ce cri du cœur au cinéma fauché se cache une blague qui ravira le spectateur attentif qui avait aperçu tous les moments de flottements et comportements étranges du court-métrage.

C’est une jolie trouvaille, quelque peu survendue, où il faut véritablement endurer 30 mins pour apprécier, sans s’extasier une bonne heure de cinéma.
Au même titre que la campagne de vaccination en France, les plus récalcitrants diront qu’être mené 3-0 au bout de 10’ de jeu est sans hésiter un départ manqué et baisseront les bras tandis que les plus optimistes (probablement des supporters de Liverpool de 2007) défendront l’idée qu’on doit persister et qu’on peut toujours revenir au score à 3-3 et gagner à la séance de tirs au but. Ne coupez pas est un cinéma optimiste pour des optimistes !

07.01.21 MUBI

Varda c’est le corps de ma grand-mère dans la tête de Candide. Son cœur est tissé de filaments poétiques qu’elle démêle sous nos yeux, pliant la laideur de la dèche, comprimant les gros camions des autoroutes dans ses mains. Ses mains ridées qu’elle filme comme une patate. Sans condescendance ni mépris, Varda filme la France des glaneurs comme Rembrandt la peignait en son temps. Varda c’est le cinéma improvisé qui sublime l’humanité et qui n’écrase pas son spectateur. C’est populiste et c’est tant mieux.

07.01.21 – HD sur TV

Double ration de Costner en 2021 : Les Incorruptibles et le soldat corruptible de Danse avec les loups une semaine plus tard !

Le deuxième film surpasse le premier, ne serait-ce que dans l’ampleur de l’œuvre qui s’étend dans des paysages infinis. Quitte à être gourmand, autant opter pour l’option Director’s cut de 3h52 qui, en comparant, n’apporte pas grand chose, hormis des réponses supplémentaires (notamment la désaffection initiale des hommes du fort) dont on aurait très bien pu se passer. Le film partage avec Impitoyable, de magnifiques paysages. J’aborde Impitoyable, d’abord parce qu’il est excellent et ensuite par que ces deux films ont pour point commun de clôturer le western classique de l’époque. Les 3 premiers quart du film sont grandioses, avec une narration décousus, des instants contemplatifs plus que méditatifs. La solitude comme point d’orgue d’une œuvre où les animaux et le silence sont de remarquables compères. Le véritable intérêt du film vient de l’incompréhension de deux cultures qui peu à peu arriveront à s’entendre. Malheureusement, le récit s’effrite et tombe dans les travers de la romance amoureuse et de la bataille Indiens/Soldats qui surlignent la laideur des comportements humains (au cas où on aurait pas compris…) Une œuvre moins marquante qu’elle aurait pu être si elle avait proposé davantage d’espace et de réflexions au spectateur.

08.01.21 – DVD

Foucault a inventé le concept philosophique d’hétérotopie (localisation physique de l’utopie), Kim Ki-duk en a fait une application cinématographique. À partir du moment où l’enfant se met à pleurer, syndrome de Stendhal dans mes yeux, il n’a cessé de pleuvoir de joie dans mon corps.

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