C’est une première : les recettes du box-office chinois en 2020 ont dépassé celles des Etats-Unis. Les nouvelles routes de la soie s’étalent, loin au-delà de leurs frontières, jusqu’au monde du cinéma. Si le pays d’Hollywood n’est plus le berceau mondial des recettes du cinéma, au Festival de Cannes, la France et son Président de jury américain roulent sur les nouvelles routes de la suie.
Julia Ducournau, découverte au Festival Premiers Plans à Angers avec son premier long-métrage Grave, revient avec TITANE, un film palmé d’or, qui marche comme un canard boiteux. Sur la route 69, l’essence précède l’existence. Sartre a toujours la nausée (et c’est tant mieux), pourtant, la carrosserie de la mise en scène est impeccable, reluisante, bien lustrée, titanée. Mais le canard est boiteux. Je me répète, je tourne en rond, pas plus, pas moins que ce film boiteux dont le slogan pourrait se résumer ainsi : « je danse, je violence, j’indépendance, je cadence donc je suis ». Mais quand je pense, je suie seulement.
D’un scénario irrévérencieux mais très référencé découle une histoire d’ardeur froide où les chemins tels des terminaisons nerveuses proposent une multiplicité de voies déjà sabotées. Que faire de cette grossesse embarrassante ? Comment filmer un corps de femme tout en étant une femme à la réalisation ? Comment faire de ces êtres de chair, des êtres chers ? Comment ne pas tomber dans le panneau de la surenchère ? Comment faire pour que les ellipses ne soient pas des passages manqués à la station-service ? Le film avance mais a-t-il encore du carburant ? L’admiration pour la mise en scène ne suffit pas à s’attacher aux personnages. Les corps sont de titanes, le film est pyromane : un feu de cheminée dans la TV. Ne reste aucune traînée sur le bitume mais, il faut bien le reconnaître, le talent de sa réalisatrice, de ses acteurs et de ces nouvelles routes de cinéma qui s’ouvrent sont prometteuses.
PS : Et si ce canard boiteux n’était que le Lindon de la farce ?
Thomas Pouteau 